Yoann Grange

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Comment on est passé d'un coût d'acquisition par lead de 1 500 € à 7 € en quelques mois ?

Publié le 29/12/2018

En Septembre 2017, j'ai commencé chez un des leaders du travail du sol. Entendez entreprise familiale qui conçoit, assemble et distribue des machines telles que des charrues, des outils à disques, des outils à dents...

500 salariés, plusieurs usines, plusieurs filiales, une distribution via un réseau de distributeurs indépendants... En gros, la classique dans le machinisme agricole. Au fil des années, l'entreprise grossit par croissance externe.

Charrue Grégoire Besson Rover au labour

A partir de 2015, les chiffres (entendez le CA et la marge) baissent. Et donc, on commence à se poser des questions... Pourquoi ? Comment ? Où ? On envisage des réponses... On fait venir des auditeurs qui les confirment.

Globalement, une gamme qui s'est épaissie au fil du temps et une optimisation qui n'a pas eu lieu. Des économies d'échelles qui disparaissent, des coûts structurels qui augmentent, une complexité qui galope et des investissements inévitables qui arrivent.

Jusque-là, le marketing était un peu le service "réclame". "Les gens qui font des brochures, qui organisent des salons..." Mais au moment de lancer un nouveau projet d'entreprise, on s'aperçoit qu'il faut attaquer par (entendez épurer) la gamme de produits et que c'est au Marketing de s'en charger.

Au préalable, c'était du ressort du bureau d'études de répondre au besoin des ventes. Dès lors, la question n'était pas de savoir si un produit allait être rentable ou s'il disposait d'un product-market fit mais plutôt de savoir si on pouvait le fabriquer.

Par conséquent, puisque les ventes avaient des demandes, le bureau d'études répondait par la positive. Ce qui avait pour effet d'élargir encore plus la gamme et de créer les fameux "moutons à 5 pattes".

Le service après-vente en héritait à plus ou moins long terme et ça venait ajouter des coûts.

Entretien sur une tendille de charrue Grégoire Besson

Comme il fallait désormais donner un gros coup de machette à tout ça, la gamme a subi une évaporation de 50% des modèles ; en gros, tout ce qui était vendu à moins de 5 unités annuelles.

Ensuite, un nouveau naming a fait son apparition. Plus de clarté, plus de lisibilité, plus de mémorisation pour les distributeurs et les clients.

Moins de produits, mais qui désormais répondent à de véritables besoins/parts de marché, qui correspondent à des volumes suffisants pour que les achats négocient des coûts bas et dont le prix final n'est pas hors marché.

Bref, vous me direz : "Ok, mais en quoi ça a un lien avec le coût d'acquisition par lead ?" - Patience, on y arrive. Avant de marketer, il faut quelque chose à vendre.

Grâce à la restructuration de la gamme et au nouveau naming, on repense le marketing dans sa globalité.

Auparavant, chaque année, on envoyait un tarif papier, de 200 pages, à tous les concessionnaires du monde entier. Je vous laisse imaginer le coût. La seconde étape a été d'arrêter les impressions et d'envoyer un PDF par email.

Ancien tarif papier Grégoire Besson

Bien que mal accueilli au départ, ce changement a été vite compris par les distributeurs. Très vite, on se rend compte qu'il y a encore d'autres leviers de croissance pour qu'on passe du marketing à la papa à quelque chose de plus efficace.

En regardant le coût des salons, on se rend compte, à titre d'exemple, qu'un seul salon peut nous coûter 500 000 € en stand, hôtel, logistique... (hors temps d'organisation) et nous apporter 300 leads à peine en quelques jours.

Et, si on regarde de plus près, dans les 300 leads, certains n'ont pas vraiment de projet d'achat, certains sont déjà clients... mais bon, grosso modo partons du constat que ce type de marketing nous amène le lead à 1500 € l'unité.

A partir de ce moment, on s'est dit qu'on allait se concentrer uniquement sur cette métrique et la baisser au maximum. (Premier A du framework AARRR). Faire de l'acquisition, de la bonne, de la pas chère et ne jamais s'arrêter d'améliorer. Tester, itérer.

Grégoire Besson - Modèle Normandie, Déchaumeur à disques

Alors on a commencé par ne pas participer à certains salons, réduire la voilure sur d'autres et surtout miser tout ce qu'on pouvait récupérer sur de l'acquisition de leads via le web.

Autant vous dire que le site web précédent faisait un peu de peine... et que, surtout, il ne transformait pas. Vaguement une quinzaine de leads mensuels, essentiellement français et aucune idée de leur provenance.

On s'est donc attelés à ne pas y toucher et à imaginer une nouvelle expérience pour les commerciaux, les distributeurs et les clients.

On a pensé à un site où les utilisateurs voient d'un coup d'oeil tout ce qu'on propose, trouvent ce qui correspond à leur besoin principal, à leur contrainte majeure (puissance tracteur) et peuvent configurer de A à Z un produit pour demander un devis.

Animation d'un exemple de configuration

En moins de 5 mois, le site était en ligne. Il ne restait plus qu'à drainer un trafic qualifié. On a commencé par Google Ads : bons résultats (0,25 € CPC ; 8,70 € CPL). On a aussi essayé la presse en ligne spécialisée : nettement moins bons (0.76 € CPC ; 69 € CPL).

On a tout misé sur Adwords et on a amélioré les campagnes. Aujourd'hui, on a un site à jour, en 6 langues, avec un configurateur en ligne, qui draine 110 leads mensuels à 7,12 € / lead. On close les leads web à 84%. Le coût du projet de refonte a été remboursé le 1er mois. Et oui, les matériels se vendent entre 15 000 et 130 000 €.

Avec Google Ads, on a désormais des leads sur des commandes multiples de produits qu’on ne pensait jamais vendre en France.

Sans tomber dans la politique, c’est avant tout un travail d’équipe. En premier lieu, Nicolas Millet, mon chef. Ensuite, les collègues, qui m’ont permis de comprendre la gamme et l’agronomie du travail du sol. Ma collègue qui s'est mise à Git et à Json en 2 mois à 49 ans. Enfin l’agence qui a fait un super boulot niveau dev. Et je ne parle pas des contributeurs de vue.js, des personnes derrière les différents produits de Google, des traducteurs, des agriculteurs qui ont laissé un témoignage, des concurrents qui nous ont poussé à le faire, de l’ecosystème des salons qui a besoin de se faire disrupter dur...

C’est au pied du mur qu’on voit le mieux le mur ; et que finalement, une corde et un grappin semblent une solution tout à fait envisageable.